BONAPARTE.



Au Caire, le 17 frimaire an 7 (7 décembre 1798).

À l'intendant-général de l'Égypte.

J'ai reçu, citoyen, la lettre que m'a écrite la nation cophte. Je me ferai toujours un plaisir de la protéger: désormais elle ne sera plus avilie, et, lorsque les circonstances le permettront, ce que je prévois n'être pas éloigné, je lui accorderai le droit d'exercer son culte publiquement, comme il est d'usage en Europe, en suivant chacun sa croyance. Je punirai sévèrement les villages qui, dans les différentes révoltes, ont assassiné des cophtes. Dès aujourd'hui, vous pourrez leur annoncer que je leur permets de porter des armes, de monter sur des mules ou sur des chevaux, de porter des turbans et de s'habiller de la manière qui peut leur convenir. Mais si tous les jours seront marqués de ma part par des bienfaits; si j'ai à restituer à la nation cophte une dignité et des droits inséparables de l'homme, qu'elle avait perdus, j'ai le droit d'exiger sans doute des individus qui la composent beaucoup de zèle et de fidélité au service de la république. Je ne peux pas vous dissimuler que j'ai eu effectivement à me plaindre du peu de zèle que plusieurs y ont mis. Comment en effet, lorsque tous les jours des principaux scheicks me découvrent les trésors des mameloucks, ceux qui étaient leurs principaux agens ne me font-ils rien découvrir?

Je rends justice à votre zèle et a celui de vos collaborateurs, ainsi qu'à votre patriarche, dont les vertus et les intentions me sont connues, et j'espère que, dans la suite, je n'aurai qu'à me louer de toute la nation cophte.

Je donne l'ordre pour que vous soyez remboursé, dans le courant du mois, des avances que vous avez faites.

BONAPARTE.



Au Caire, le 17 frimaire an 7 (7 décembre 1798).

Au citoyen Poussielgue.

Vu les pertes que nous avons éprouvées sur les diamans, la femme de Mourad-Bey sera tenue de verser dans la caisse du payeur 8,000 talaris dans l'espace de cinq jours.

BONAPARTE.



Au Caire, le 18 frimaire an 7 (8 décembre 1798).

Au général Rampon.

Vous devez avoir reçu, citoyen général, du pain pour quatre jours.

Si cette lettre vous arrive à temps, vous partirez demain avec la plus grande partie de votre monde pour aller reconnaître la position de Géziré-Bili, qui est à quatre lieues de l'endroit que vous occupez. Quand vous serez à une demi-lieue de ladite position, vous ferez connaître à ladite tribu de Bili qu'elle n'a rien à craindre; qu'elle peut rester dans son camp, parce que vous avez été prévenu que le scheick était venu me voir et avait obtenu grâce.

Vous tiendrez note de tous les villages par où vous passerez pour arriver à Géziré, et vous observerez les différentes positions qu'occupent les Arabes, afin que, si les circonstances exigent que vous deviez y marcher, vous sachiez comment faire.

Vous aurez soin que les troupes ne fassent aucun mal, et après vous être promené en différens sens, avoir demandé s'il y a des mameloucks à El-Mansoura, qui est un village près de Géziré, avoir recommandé à tous les villages de payer exactement le miri au général commandant la province, et à ne pas cacher les mameloucks, à les déclarer s'il y en a, vous retournerez, s'il est possible, coucher à Birket-el-Hadji.

Si cette lettre vous arrivait demain trop tard, vous remettriez la partie à après-demain.

BONAPARTE.



Au Caire, le 19 frimaire an 7 (9 décembre 1798).

Au général Menou.

Je reçois votre lettre du 14, citoyen général: je venais d'ordonner la mesure que vous me proposez, de vendre soixante-quatre mille pintes de vin. Veillez autant qu'il vous sera possible à ce que ces fonds rentrent dans la caisse du payeur, et que les voleurs n'en vendent pas une plus grande quantité pour masquer leurs vols. Écrivez au général Marmont pour qu'il fasse vendre les vins les plus aigres et les plus près de se gâter, et que l'on profite de cette circonstance pour vérifier ce qu'il y a en magasin.

J'ai reçu votre lettre du 15, dans laquelle vous m'apprenez que messieurs les Anglais ont évacué Aboukir. Profitez-en pour faire passer à Alexandrie la plus grande quantité de blé possible.

BONAPARTE.



Au Caire, le 19 frimaire an 7 (9 décembre 1798).

Au général Ganteaume.

Vous voudrez bien, citoyen général, faire partir d'Alexandrie le brick le Lodi pour se rendre à Derne. Il prendra tous les renseignemens qu'il pourrait acquérir sur les nouvelles de France et d'Europe.

Je suis instruit que plusieurs tartanes de Marseille, expédiées par le gouvernement, y sont arrivées dans le courant de brumaire, et n'y ont séjourné que vingt-quatre heures, après avoir pris des renseignemens sur les Anglais et sur notre position. Comme il est extrêmement intéressant que la mission de ce brick soit ignorée, vous lui donnerez ses instructions à ouvrir en mer.

Vous lui ordonnerez de prendre des pilotes d'Alexandrie, connaissant la côte depuis Alexandrie jusqu'à Saint Jean-d'Acre et depuis Alexandrie jusqu'à Tripoli.

J'imagine que la tartane que j'avais ordonné d'envoyer depuis long-temps à Derne, sera partie: si elle ne l'était pas, vous ordonneriez, au préalable, au citoyen Dumanoir de n'expédier le Lodi que vingt-quatre heures après la tartane, en ayant bien soin que la tartane ignore que ce brick devait partir.

Ce brick portera le citoyen Arnaud, qui, parlant parfaitement la langue, et ayant eu des relations avec Derne, pourra plus facilement prendre tous les renseignemens nécessaires.

Vous spécifierez bien au commandant du brick que le citoyen Arnaud n'est rien sur son bord, et n'a point d'ordre à lui donner, et que lui seul est responsable de la manière dont sa mission sera remplie.

Vous lui ferez connaître qu'il faut qu'il retourne le plus tôt possible à Alexandrie.

Je compte que son absence sera de moins de quinze jours; que, sous quelque prétexte que ce soit, il ne doit point cingler vers l'Europe; que cela serait regardé par le gouvernement comme une lâcheté et une trahison, dont un Français ne peut être soupçonné.

Vous donnerez deux ordres au commandant du brick: 1°. de partir et d'ouvrir ses instructions à telle hauteur, et d'embarquer, au moment du départ, un homme qui lui sera remis par le général Marmont, commandant de la place;

2°. Son instruction à ouvrir en mer.

BONAPARTE.



Au Caire, le 19 frimaire an 7 (9 décembre 1798).

Instructions pour le citoyen Arnaud.

Le brick sur lequel vous êtes embarqué, citoyen, vous conduira à Derne.

Vous remettrez les lettres ci-jointes au commandant de Derne; vous prendrez tous les renseignemens sur les nouvelles d'Europe et de Tripoli.

Vous me rendrez compte de votre mission et de tout ce que vous aurez vu et appris en mer, en expédiant de Derne deux Arabes.

Le brick vous ramènera à Alexandrie, et, à peine débarqué, vous viendrez au Caire sans communiquer à personne les nouvelles que vous aurez pu apprendre.

Je compte sur votre zèle et sur vos lumières. Je saurai vous tenir compte du service que vous aurez rendu dans cette occasion à la république.

BONAPARTE.



Au Caire, le 19 frimaire an 7 (9 décembre 1798).

Au bey de Tripoli.

Je profite d'un bâtiment qui va à Derne pour vous renouveler l'assurance de vivre avec vous en bonne intelligence et amitié.

Dans plusieurs lettres que je vous ai écrites, je vous ai témoigné le désir que j'ai de vous être utile ainsi qu'à ceux qui dépendent de vous.

Je vous prie, lorsque vous aurez des nouvelles d'Europe, de me les envoyer par des exprès.

Croyez aux sentimens d'estime et à la considération que j'ai pour vous.

BONAPARTE.



Au Caire, le 20 frimaire an 7 (10 décembre 1798).

Au citoyen Poussielgue,

Vous voudrez bien, citoyen, ordonner sur-le-champ au citoyen Marco-Calavagi, agent du citoyen Rosetti à Terraneh, de verser dans la caisse du payeur, la valeur de deux mille moutons et de cinquante chameaux, que le général Murat avait pris aux Arabes et qu'il a fait restituer en disant que c'était mon intention.

BONAPARTE.



Au Caire, le 11 frimaire an 7 (11 décembre 1798).

Au commissaire du gouvernement, à Zante.

Je vous expédie le brick le Rivoli pour avoir de vos nouvelles et de celles de Corfou.

Faites-moi passer toutes les gazettes françaises, italiennes ou allemandes que vous auriez depuis le mois de messidor, ainsi que les nouvelles que vous pourriez avoir d'Italie ou de France, et de tous les bâtimens anglais, russes ou turcs qui auraient paru sur vos côtes depuis ledit mois de messidor.

Donnez-moi toutes les nouvelles que vous pourriez avoir sur Passwan-Oglou et sur Constantinople.

Envoyez-nous ici un Français intelligent qui puisse me donner de vive voix toutes les petites nouvelles que vous pourriez avoir oubliées.

Expédiez des bâtimens à Corfou et en Italie pour faire connaître au commandant de cette place et au gouvernement français que tout va au mieux ici.

Expédiez-moi souvent des bâtimens sur Damiette.

Les journaux et les imprimés que je vous fais passer vous mettront à même de connaître notre position.

Je vous, recommande de ne pas retenir le Rivoli plus de trois ou quatre heures, et de le faire repartir tout de suite, car je suis impatient d'avoir de vos nouvelles.

BONAPARTE.



Au Caire, le 21 frimaire an 7 (11 décembre 1798).

Au général Marmont.

Cette lettre, citoyen général, vous sera remise par le citoyen Beauchamp.

Vous ferez appeler le capitaine de la caravelle: vous lui direz que je consens à ce que son bâtiment parte pour Constantinople aux conditions suivantes:

1°. Qu'il laissera en ôtages ses deux enfans et l'officier de la caravelle, son plus proche parent, pour me répondre du citoyen Beauchamp, qui va s'embarquer à son bord pour se rendis à Constantinople.

2°. Qu'il passera devant l'île de Chypre; qu'il fera entendre au pacha que nous ne sommes pas en guerre avec la Porte; qu'il nous renvoie le consul et les Français qui sont à Chypre; qu'il les fera embarquer devant lui sur une djerme pour se rendre à Damiette; qu'en conséquence vous allez tenir en arrestation un officier et dix hommes de la caravelle pour répondre du consul et des Français à Chypre, lesquels seront envoyés à Damiette et renvoyés sur le même bâtiment qui amènera les Fiançais de Chypre à Damiette.

3°. Qu'il sortira du port d'Alexandrie de nuit, afin d'échapper à la croisière anglaise; qu'il évitera Rhodes, afin d'échapper aux Anglais.

4°. Qu'après que le citoyen Beauchamp aura causé avec le grand-visir à Constantinople, il sera chargé de le faire revenir à Damiette, et que, sur le même bâtiment qui ramènera le citoyen Beauchamp, je ferai placer ses enfans et l'officier qu'il aura laissés en ôtages.

5°. Que du reste il peut compter que, dans tous les événemens, je serai fort aise de lui être utile.

Vous dresserez de votre séance avec lui un procès-verbal en turc et en français, qu'il signera avec vous, et dont vous et lui garderez une copie, en me faisant passer l'original.

Cette conversation devra avoir lieu à neuf heures du matin: vous lui mènerez le citoyen Beauchamp à bord. Vous aurez soin auparavant que l'on tienne tout prêts sur un bâtiment les affûts et tous les objets qu'on aurait à lui rendre.

Dès l'instant que le procès-verbal sera signé et que les ôtages seront remis, vous lui ferez rendre ses effets; et la nuit, si le temps est beau, il devra partir, ayant bien soin:

1°. Que votre entretien et la mission du citoyen Beauchamp soient parfaitement secrets;

2°. Que le commandant de la caravelle, en arrivant à la conférence, ait avec lui ses enfans et les personnes que vous voulez garder pour ôtages, que vous lui désignerez pour qu'ils se rendent à la conférence, et que vous laisserez dans un autre appartement.

3°. Qu'il n'ait plus, le reste de la journée, aucune espèce de communication avec la terre sous quelque prétexte que ce soit, afin que personne ne sache le départ de la caravelle: sans quoi ces gens-là embarqueraient beaucoup de marchandises et beaucoup de monde.

Il faut que le lendemain à la pointe du jour, les Français et les gens du pays soient tout étonnés de ne plus voir la caravelle.

Quelque observation qu'il puisse vous faire, vous déclarerez que, s'il ne part pas dans la nuit, il vous faudra de nouveaux ordres pour le laisser partir.

Je vous envoie deux ordres que vous remettrez au commandant des armes, deux ou trois heures avant l'exécution.

BONAPARTE.



Au Caire, le 21 frimaire an 7 (11 décembre 1798).

Instruction pour le citoyen Beauchamp.

Vous vous rendrez à Alexandrie; vous vous embarquerez sur la caravelle; vous aborderez à Chypre, vous demanderez au pacha, de concert avec le commandant de la caravelle, qu'on envoie à Damiette le consul et les Français qu'on a arrêtes dans cette île.

Vous prendrez à Chypre tous les renseignemens possibles sur la situation actuelle de la Syrie, sur une escadre russe qui serait dans la Méditerranée, sur les bâtimens anglais qui auraient paru ou qui y seraient constamment en croisière, sur Corfou, sur Constantinople, sur Passwan-Oglou, sur l'escadre turque, sur la flottille de Rhodes, commandée par Hassan-Bey, qui a été pendant un mois devant Aboukir, sur les raisons qui empêchent qu'on apporte du vin à Damiette, enfin sur les bruits qui seraient parvenus jusque dans ce pays-là sur l'Europe.

Vous m'expédierez toutes ces nouvelles avec les Français, si on les relâche, sur un petit bâtiment qui viendrait à Damiette; ou, lorsque vous verrez l'impossibilité de porter ces gens-là à relâcher les Français, vous expédieriez un petit bateau avec un homme de la caravelle pour me porter vos lettres, et sous le prétexte de me mander que le capitaine de la caravelle, ayant fait tout ce qu'il a pu, je fasse relâcher les matelots de la caravelle.

À toutes les stations que le temps ou les circonstances vous feraient faire dans les différentes échelles du Levant, vous m'expédierez des nouvelles par de petits bâtimens envoyés exprès à Damiette, et qui seront largement récompensés.

Arrivé à Constantinople, vous ferez connaître à notre ministre notre situation dans ce pays-ci; de concert avec lui, vous demanderez que les Français qui ont été arrêtés en Syrie soient mis en liberté, et vous ferez connaître le contraste de cette conduite avec la nôtre.

Vous ferez connaître à la Porte que nous voulons être ses amis; que notre expédition d'Égypte a eu pour but de punir les mameloucks, les Anglais, et empêcher le partage de l'empire ottoman que les deux empereurs, ont arrêté; que nous lui prêterons secours contre eux, si elle le croit nécessaire, et vous demanderez impérieusement et avec beaucoup de fierté qu'on relâche tous les Français qu'on a arrêtés; qu'autrement cela serait regardé comme une déclaration de guerre; que j'ai écrit plusieurs fois au grand-visir sans avoir eu une réponse, et qu'enfin la Porte peut choisir et voir en moi ou un ami capable de la faire triompher de tous ses ennemis, ou un ennemi aussi redoutable que tous ses ennemis.

Si notre ministre est arrêté, vous ferez ce qu'il vous sera possible pour pouvoir causer avec des Européens: vous reviendrez en apportant toutes les nouvelles que vous pourrez recueillir sur la position actuelle politique de cet empire.

Vous aurez soin de vous procurer tous les journaux en quelque langue qu'ils soient depuis messidor.

Si jamais on vous faisait la question: Les Français consentiront-ils à quitter l'Égypte? Pourquoi pas, pourvu que les deux empereurs fassent finir la révolte de Passwan-Oglou et abandonnent le projet de partager la Turquie européenne? Que, quant à nous, nous ferons tout ce qui pourrait être favorable à l'Empire ottoman et le mettre à l'abri de ses ennemis: mais que le préliminaire à toute négociation, comme à tout accommodement, est un firman qui fasse relâcher les Français partout où on les a arrêtés, surtout en Syrie.

Vous direz et ferez tout ce qui pourra convenir pour obtenir cet élargissement; vous déclarerez que vous ne répondez pas que je n'envahisse la Syrie, si on ne met pas en liberté tous les Français qu'on a arrêtés; et, dans le cas où on voudrait vous retenir, que si, sous tant jours, je ne vous voyais pas revenir, je pourrais me porter à une invasion.

Enfin le but de votre mission est d'arriver à Constantinople, d'y demeurer, de voir nos ministres sept à huit jours, et de retourner avec des notions exactes sur la position actuelle de la politique et de la guerre de l'empire ottoman.

Profitez de toutes les occasions pour m'écrire et pour m'expédier des bâtimens à Damiette.

De Constantinople, expédiez une estafette à Paris par Vienne avec tous les renseignemens qui pourraient être nécessaires au gouvernement: vous lui ferez passer les relations et imprimés que je joins ici à cet effet.

Ainsi, si la Porte ne nous a point déclaré la guerre, vous paraîtrez à Constantinople comme pour demander qu'on relâche le consul français et qu'on laisse libre le commerce entre l'Égypte et le reste de l'empire ottoman.

Si la Porte nous avait déclaré la guerre et avait fait arrêter nos ministres, vous lui direz que je lui renvoie sa caravelle comme une preuve du désir qu'a le gouvernement français de voir se renouveler la bonne intelligence entre les deux états, et en même temps vous demanderez notre ministre et les autres Français qui sont à Constantinople.

Vous lui ferez plusieurs notes pour détruire tout ce que l'Angleterre et la Russie pourraient avoir imaginé contre nous, et vous reviendrez.

BONAPARTE.



Au Caire, le 21 frimaire an 7 (11 décembre 1798).

Au grand-visir.

J'ai écrit plusieurs fois à votre excellence pour lui faire connaître les intentions du gouvernement français, de continuer à vivre en bonne intelligence avec la Sublime Porte. Je prends aujourd'hui le parti de vous en donner une nouvelle preuve en vous expédiant la caravelle du grand-seigneur et le citoyen Beauchamp, consul de la république, homme d'un grand mérite, et qui a entièrement ma confiance.

Il fera connaître à votre excellence que la Porte n'a point de plus véritable amie que la république française, comme elle n'aurait pas d'ennemie plus redoutable, si les intrigues des ennemis de la France parvenaient à avoir le dessus à Constantinople: ce que je ne pense pas, connaissant la sagesse et les lumières de votre excellence.

Je désire que votre excellence retienne le citoyen Beauchamp à Constantinople le moins de temps possible, et me le renvoie pour me faire connaître les intentions de la Porte.

Je prie votre excellence de croire aux sentimens d'estime et à la haute considération que j'ai pour elle.

BONAPARTE.



Au Caire, le 21 frimaire an 7 (11 décembre 1798).

Au citoyen Talleyrand, ambassadeur à Constantinople.

Je vous ai écrit plusieurs fois, citoyen ministre; j'ignore si mes lettres vous sont parvenues; je n'en n'ai point reçu de vous.

J'expédie à Constantinople le citoyen Beauchamp, consul à Mascate, pour vous faire connaître notre position, qui est extrêmement satisfaisante, et pour, de concert avec vous, demander qu'on mette en liberté tous les Français arrêtés dans les échelles du levant et détruire les intrigues de la Russie et de l'Angleterre.

Le citoyen Beauchamp vous donnera de vive voix tous les détails et toutes les nouvelles qui pourraient vous intéresser.

Je désire qu'il ne reste à Constantinople que sept à huit jours.

BONAPARTE.



Au Caire, le 22 frimaire an 7 (12 décembre 1798).

Au général Reynier.

Je désirerais, citoyen général, qu'avant de faire un tour à Salahieh, vous envoyassiez cinq ou six colonnes mobiles dans les différens points de votre province.

Tous les villages qui n'auront pas vu la troupe ne se regarderont pas comme soumis: c'est le seul moyen, d'ailleurs, de faire lever le miri et les chevaux. Votre province est celle qui est le plus en retard.

Le général Lagrange porte avec lui des outres. Mon intention serait que vous lui procurassiez une quinzaine de chameaux; et, après qu'il aura passé quelques jours a Salahieh pour y organiser son service et rendre des visites aux villages qui se sont mal conduits pendant l'inondation, je désire qu'on aille occuper Catieh, où mon intention est de faire construire un fort.

BONAPARTE.



Au Caire, le 22 frimaire an 7 (12 décembre 1798).

Au général Marmont.

J'ai reçu, citoyen général, votre lettre du 14.

Il est toujours plus intéressant de rendre compte d'une mauvaise nouvelle que d'une bonne, et c'est vraiment une faute que vous avez faite, d'oublier de rendre compte des neuf prisonniers qu'ont faits les Anglais à la quatrième demi-brigade.

L'état-major donne l'ordre à la légion nautique de se rendre à Foua, d'où je la ferai venir au Caire pour l'habiller et l'organiser, afin qu'elle puisse retourner, si les circonstances l'exigeaient, et servir utilement.

Envoyez-moi au Caire tous les individus inutiles. J'ai ordonné le désarmement de la galère, qui a quatre ou cinq cents hommes qui mangent beaucoup et ne nous rendraient pas un service utile les armes à la main.

Dès l'instant que vous aurez envoyé ici beaucoup d'hommes du convoi, et qu'il n'y aura plus que des vieillards ou des hommes inutiles, j'en ferai partir la plus grande partie.

Vous devez avoir beaucoup de pèlerins; débarrassez-vous-en le plus tôt possible, ou par terre ou par mer.

Envoyez aussi des Arabes à Derne pour avoir des nouvelles; il y arrive souvent des tartanes de Marseille.

BONAPARTE.



Au Caire, le 23 frimaire an 7 (13 septembre 1798).

Au général Bon.

J'ai reçu, citoyen général, vos lettres des 20 et 21.

Il est parti hier un convoi.

Vous avez dû recevoir, par le premier convoi, du riz, du biscuit, de l'eau-de-vie, des matelots, des ouvriers de toute espèce, des outils et des sapeurs.

Je vous ai mandé hier de faire venir tous les chameaux qui vous ont porté du biscuit; joignez-y les chameaux qui ont porté notre artillerie. Ne gardez que les chameaux qui doivent porter l'eau à votre troupe. Ayez soin surtout que les chameaux des Arabes soient parfaitement libres: il faut faire ce que ces gens-là veulent. Laissez passer les lettres pour Djedda sans les décacheter, et laissez aller et venir chacun librement. Le commerce est souvent fondé sur l'imagination. La moindre chose est un monstre pour ces gens-ci, qui ne connaissent pas nos moeurs.

Je vous recommande de faire mettre une corde au puits d'Adjeroud, de manière que l'on puisse s'en servir. On dit que l'eau est bonne pour les chevaux.

Gardez spécialement les matelots, les sapeurs et les Turcs d'Omar, une partie de la trente-deuxième, et renvoyez l'autre partie.

BONAPARTE.



Au Caire, le 23 frimaire an 7 (13 décembre 1798).

Au général Leclerc.

Je vous préviens, citoyen général, que j'ai fait arrêter Cheraïbi: si vous êtes encore à Nay, vous vous rendrez à Kélioubé pour mettre le scellé sur tous ses biens. Vous écrirez au divan de la province et aux scheicks des Arabes que Cheraïbi a été arrêté, parce qu'il m'a trahi, parce qu'il a, malgré ses sermens de fidélité, correspondu avec les mameloucks, et, le jour de la révolte du Caire, appelé les habitans des différens villages qui environnent cette ville, à se joindre aux révoltés; qu'ils doivent d'autant plus sentir la justice de l'arrestation de Cheraïbi, qu'ils ont été témoins de ses crimes, et que je l'avais comblé de bienfaits.

BONAPARTE.



Au Caire, le 23 frimaire an 7 (13 décembre 1798).

Au commandant de la place du Caire.

Je vous envoie, citoyen général, Cheraïbi, chef de la province de Kélioubé. Vous le ferez mettre en prison à la citadelle et au secret, afin qu'il n'ait de communication avec qui que ce soit. Vous prendrez toutes les mesures nécessaires pour qu'il ne puisse pas s'échapper.

BONAPARTE.



Au Caire, le 25 frimaire an 7 (15 décembre 1798).

Au général Bon.

L'adjudant-général Valentin, citoyen général, est parti hier de Berket-el-Hadji. J'ai reçu votre lettre du 22.

Vous me demandez de vous envoyer Mustapha-Effendi; mais il doit être avec vous. Il n'est pas au Caire; il est parti immédiatement après votre colonne. Si, à l'heure qu'il est, il n'est pas à Suez, je crains fort qu'il n'ait été assassiné. Au reste, je vais prendre des renseignemens.

L'adjudant-général Valentin doit être arrivé, et vous allez vous trouver approvisionné pour long-temps.

On enverra, par la première occasion, de l'argent pour les Turcs et pour les fortifications.

Envoyez-nous les chameaux qui ont porté vos pièces. Comme elles doivent rester à Suez, ils vous sont inutiles, et serviront à vous en porter d'autres.

Si vos rhumatismes, au lieu de se guérir, continuaient à empirer, vous laisseriez le commandement à l'adjudant-général Valentin, et vous vous rendriez au Caire.

BONAPARTE.



Au Caire, le 26 frimaire an 7 (16 décembre 1798).

Au contre-amiral Perrée.

Je vous envoie, citoyen général, un sabre en remplacement de celui que vous avez perdu à la bataille de Chebreisse. Recevez-le, je vous prie, comme un témoignage de la reconnaissance que j'ai pour les services que vous avez rendus à l'armée dans la conquête de l'Égypte.

BONAPARTE.



Au Caire, le 27 frimaire an 7 (17 décembre 1798).

Au général Dugua.

Je reçois, citoyen général, votre lettre du 20 frimaire, de Mansoura, relative au commerce de Damiette avec la Syrie. Mon intention est que le commerce soit entièrement libre. L'inconvénient d'aider à la subsistance de nos ennemis est compensé par d'autres avantages.

BONAPARTE.



Au Caire, le 27 frimaire an 7 (17 décembre 1798).

Au même.

J'ai lu avec surprise dans votre lettre, citoyen général, que l'on employait l'argent du miri à acheter du blé. Ce doit être une coquinerie des intendans; je vais m'en faire rendre compte. Mais je vous prie de tenir la main à ce que le produit de toutes les impositions entre dans la caisse des préposés du payeur général, et n'en sorte plus sans l'ordre du payeur.

BONAPARTE.



Au Caire, le 27 frimaire an 7 (17 décembre 1798).

Au contre-amiral Villeneuve.

Je n'ai point reçu de vos lettres, citoyen général; je vous envoie un aviso. Faites-moi connaître par son retour quelle est votre position et ce que vous pourriez avoir appris des mouvemens et du nombre des ennemis dans la Méditerranée.

Les ennemis n'ont que deux vaisseaux de guerre et deux frégates devant Alexandrie.

Vous devez actuellement avoir trois ou quatre vaisseaux et trois ou quatre frégates de Malte. Nous désirons bien vous voir arriver ici.

Nous aurions besoin de cinq ou six mille fusils; chargez-en un millier sur l'aviso que je vous expédie, et envoyez-nous le reste sur des bâtimens qui viendraient aborder à Damiette.

Vous devez avoir reçu du contre-amiral Ganteaume des lettres qui ont dû vous faire connaître le besoin où nous sommes d'avoir des nouvelles d'Europe, et de recevoir notre second convoi.

BONAPARTE.



Au Caire, le 27 frimaire an 7 (17 décembre 1798).

Au directoire exécutif.

Je vous ai expédié un officier de l'armée, avec ordre de ne rester que sept à huit jours à Paris, et de retourner au Caire.

Je vous envoie différentes relations de petits événemens et différens imprimés.

L'Égypte commence à s'organiser.

Un bâtiment arrivé à Suez a amené un Indien qui avait une lettre pour le commandant des forces françaises en Égypte: cette lettre s'est perdue. Il paraît que notre arrivée en Égypte a donné une grande idée de notre puissance aux Indes, et a produit un effet très-défavorable aux Anglais: on s'y bat.

Nous sommes toujours sans nouvelles de France; pas un courrier depuis messidor. Cela est sans exemple dans les colonies même.

Mon frère, l'ordonnateur Sucy et plusieurs courriers que je vous ai expédiés, doivent être arrivés.

Expédiez-nous des bâtimens sur Damiette.

Les Anglais avaient réuni une trentaine de petits bâtimens, et étaient à Aboukir; ils ont disparu. Ils ont trois vaisseaux de guerre et deux frégates devant Alexandrie.

Le général Desaix est dans la Haute-Égypte, poursuivant Mourad-Bey, qui, avec un corps de mameloucks, s'échappe et fuit devant lui.

Le général Bon est à Suez.

On travaille avec la plus grande activité aux fortifications d'Alexandrie, Rosette, Damiette, Belbeis, Salahieh, Suez et du Caire.

L'armée est dans le meilleur état et a peu de malades. Il y a en Syrie quelques rassemblemens de forces turques. Si sept jours de désert ne m'en séparaient, j'aurais été les faire expliquer.

Nous avons des denrées en abondance, mais l'argent est très-rare, et la présence des Anglais rend le commerce nul.

Nous attendons des nouvelles de France et d'Europe; c'est un besoin vif pour nos âmes: car si la gloire nationale avait besoin de nous, nous serions inconsolables de ne pas y être.

BONAPARTE.



Au Caire, le 27 frimaire an 7 (17 décembre 1798).

Au chef de division Dumanoir.

Vous voudrez bien, citoyen, faire partir, le plus promptement possible, un bâtiment pareil à celui dans lequel s'est embarqué le citoyen Louis Bonaparte: il sera approvisionné pour un mois d'eau et deux de vivres. Il prendra à son bord le citoyen ... chargé d'une mission.

Vous remettrez au commandant du bâtiment que vous expédierez, l'ordre que je vous envoie qu'il ouvrira à trois lieues en mer.

BONAPARTE.



Au Caire, le 27 frimaire an 7 (17 décembre 1798).

Au citoyen ... officier, chargé de dépêches.

Le bâtiment sur lequel vous vous embarquerez, vous conduira à Malte. Vous remettrez les lettres que je vous envoie à l'amiral Villeneuve et au général commandant de Malte.

Le commandant de la marine, à Malte, vous donnera sur-le-champ un bâtiment pour vous conduire dans un port d'Italie qu'il jugera le plus sûr, d'où vous prendrez la poste pour vous rendre en toute diligence à Paris et remettre les dépêches que je vous fais passer au gouvernement.

Vous resterez huit à dix jours à Paris: après quoi vous reviendrez en toute diligence, en venant vous embarquer dans un port du royaume de Naples ou à Ancône.

Vous éviterez Alexandrie et aborderez avec votre bâtiment à Damiette.

Avant de partir, vous aurez soin de voir un de mes frères, membre du corps législatif; il vous remettra tous les papiers et imprimés qui auraient paru depuis messidor.

Je compte, dans tous les événemens imprévus qui pourraient survenir dans votre mission, sur votre zèle, qui est de faire parvenir vos dépêches au gouvernement, et d'en apporter les réponses.

BONAPARTE.



Au Caire, le 27 frimaire an 6 (17 décembre 1798).

Au citoyen ...

Vous vous dirigerez sur Malte, citoyen, en passant hors de vue de toute terre. Si vous apprenez que le port soit bloqué, vous aborderez de préférence à la cale de Massa-Sirocco, où il y a des batteries qui vous mettront à l'abri de toute insulte.

Là, vous débarquerez l'officier que vous avez à votre bord.

Vous instruirez le Commandant de la marine à Malte et le contre-amiral Villeneuve, de tout ce que vous aurez vu en mer, et du nombre des vaisseaux qui sont devant Alexandrie, et vous demanderez les ordres du commandant de la marine.

Vous reviendrez m'apporter les dépêches du général commandant à Malte, et du contre-amiral Villeneuve, et, si vous ne pouvez pas aborder à Alexandrie, vous aborderez à Damiette ou sur tout autre point de la côte, depuis le Marabou jusqu'à Orum-Faregge à trente lieues de Damiette.

Vous ne resterez que vingt-quatre heures à Malte.

Je compte sur votre zèle dans une mission aussi importante, qui, indépendamment des nouvelles qu'elle doit nous faire avoir de l'Europe, doit nous faire venir des objets essentiels pour l'armée.

Vous chargerez sur votre bâtiment les armes que le commandant de Malte vous remettra.

BONAPARTE.



Au Caire, le 28 frimaire an 7 (18 décembre 1798).

Au général Bon.

J'ai reçu, citoyen général, votre lettre du 25. J'ai lu avec le plus vif intérêt ce que vous m'avez dit relativement à l'Indien des états de Tippoo Saïb.

Il serait nécessaire que vous fissiez sonder la rade pour savoir si des frégates de l'île de France que j'attends, pourraient, étant arrivées à Suez, s'approcher de la côte jusqu'à deux cents toises, de manière à être protégées par les batteries de la côte.

Le chef de bataillon Say est arrivé. La caravelle que je vous ai envoyée, chargée de riz et d'avoine pour les chevaux, sera sans doute arrivée également.

J'ai ordonné au kiaka des Arabes de me faire venir deux bouteilles d'eau de la source chaude qui se trouve à deux journées de Suez, sur la côte de la mer Rouge.

BONAPARTE.



Au Caire, le 28 frimaire an 7 (18 décembre 1798).

Au général Marmont.

J'ai reçu, citoyen général, votre lettre du 19 frimaire. La correspondance commence à être bien lente par le Nil.

Le citoyen Beauchamp, et mon aide-de-camp Lavalette, doivent être arrivés.

Si un bâtiment, dans la principale passe, peut favoriser l'entrée des bâtimens qui vous viendraient de France, il est nécessaire, je crois, que vous vous concertiez avec le commandant des armes pour en faire mettre un.

Envoyez à Rosette toutes les djermes, chaloupes et petits bâtimens qui peuvent passer la barre, afin de charger à Rosette pour Alexandrie des riz, du biscuit, du blé, de l'orge et autres objets. Je vais faire filer sur Rosette jusqu'à cent mille quintaux de blé; mais prenez toutes les mesures pour qu'il ne soit pas dilapidé.

Tâchez d'envoyer des Arabes à Derne. Faites écrire par un habitant d'Alexandrie à un habitant de Derne, afin de lui faire connaître que si, toutes les fois qu'il arrive des nouvelles de France, il nous les fait passer, ses courriers seront bien payés, et que lui aura une bonne récompense.

Il part demain cent mille rations de biscuit pour Rosette, et deux mille quintaux de farine.



Au Caire, le 29 frimaire an 7 (19 décembre 1798).

Bonaparte, général en chef, voulant favoriser le couvent du mont Sinaï:

1°. Pour qu'il transmette aux races futures la tradition de notre conquête;

2°. Par respect pour Moïse et la nation juive, dont la cosmogonie nous retrace les âges les plus reculés;

3°. Parce que le couvent du mont Sinaï est habité par des hommes instruits et policés, au milieu de la barbarie des déserts où ils vivent;


Ordonne:

ART 1er. Les Arabes bédouins, se faisant la guerre entre eux, ne peuvent, de quelque parti qu'ils soient, s'établir ou demander asile dans le couvent, ni aucune subsistance ou autres objets.

2. Dans quelque lieu que résident les religieux, il leur sera permis d'officier, et le gouvernement empêchera qu'ils ne soient troublés dans l'exercice de leur culte.

3. Ils ne seront tenus de payer aucun droit ni tribut annuel, comme ils ont été exemptés suivant les différens titres qu'ils en conservent.

4. Ils sont exempts de tout droit de douane pour les marchandises et autres objets qu'ils importeront et exporteront pour l'usage du couvent, et principalement pour les soieries, les satins et les produits des fondations pieuses, des jardins, des potagers qu'ils possèdent dans les îles de Scio et de Chypre.

5. Ils jouiront paisiblement des droits qui leur ont été assignés dans diverses parties de la Syrie et au Caire, soit sur les immeubles, soit sur leurs produits.

6. Ils ne paieront aucune épice, rétribution et autres droits attribués aux juges dans les procès qu'ils pourront avoir en justice.

7. Ils ne seront jamais compris dans les prohibitions d'exportation et d'achat de grains pour la subsistance de leur couvent.

8. Aucun patriarche, évêque ou autre ecclésiastique supérieur, étranger à leur ordre, ne pourra exercer d'autorité sur eux ou dans leur couvent; cette autorité étant exclusivement remise à leurs évêques et au corps des religieux du mont Sinaï.

Les autorités civiles et militaires veilleront à ce que les religieux du mont Sinaï ne soient pas troublés dans la jouissance desdits privilèges.

BONAPARTE.



Au Caire, le 1er. nivose an 7 (21 décembre 1798).

Aux habitans du Caire.

Des hommes pervers avaient égaré une partie d'entre vous: ils ont péri. Dieu m'a ordonné d'être clément et miséricordieux pour le peuple; j'ai été clément et miséricordieux envers vous.

J'ai été fâché contre vous de votre révolte; je vous ai privés pendant dix mois de votre divan; mais aujourd'hui je vous le restitue: votre bonne conduite a effacé la tache de votre révolte.

Chéryfs, eulémas, orateurs de mosquées, faites bien connaître au peuple que ceux qui, de gaîté de coeur, se déclareraient mes ennemis, n'auraient de refuge ni dans ce monde ni dans l'autre. Y aurait-il un homme assez aveugle pour ne pas voir que le destin lui-même dirige toutes mes opérations? y aurait-il quelqu'un assez incrédule pour révoquer en doute que tout, dans ce vaste univers, est soumis à l'empire du destin?

Faites connaître au peuple que, depuis que le monde est monde, il était écrit qu'après avoir détruit les ennemis de l'islamisme, fait abattre les croix, je viendrais du fond de l'occident remplir la tâche qui m'a été imposée. Faites voir au peuple que, dans le saint livre du Qoran, dans plus de vingt passages, ce qui arrive a été prévu, et que ce qui arrivera est également expliqué.

Que ceux donc que la crainte seule de nos armes empêche de nous maudire, changent; car, en faisant au ciel des voeux contre nous, ils sollicitent leur condamnation; que les vrais croyans fassent des voeux pour la prospérité de nos armes.

Je pourrais demander compte à chacun de vous des sentimens les plus secrets du coeur; car je sais tout, même ce que vous n'avez dit à personne: mais un jour viendra que tout le monde verra avec évidence que je suis conduit par des ordres supérieurs, et que tous les efforts humains ne peuvent rien contre moi: heureux ceux qui, de bonne foi, sont les premiers à se mettre avec moi!

ART 1er. Il y aura au Caire un grand divan composé de soixante personnes ci-après nommées:

(Suivent les noms).

2. Il y aura auprès du divan un commissaire français, le citoyen Cloutiers, et un commissaire musulman, Dzulfekar Kiaka.

3. Le général commandant la place fera réunir le 5 nivose, à neuf heures du matin, les membres qui doivent composer le divan général.

4. Ils procéderont à la nomination d'un président, de deux secrétaires, au scrutin et à la majorité absolue des suffrages.

5. Après quoi ils procéderont à la nomination des quatorze personnes qui devront composer le petit divan, au scrutin et à la pluralité absolue. Les séances du divan général doivent être terminées en trois jours: il ne pourra être réuni que par une convocation extraordinaire.

6. Lorsque le général en chef aura accepté les membres nommés par le divan général pour faire partie du divan, ceux-ci se réuniront et procéderont à la nomination d'un président pris dans les quatorze, d'un secrétaire, de deux interprètes pris hors des quatorze, d'un huissier, d'un chef de bâtonniers et de dix bâtonniers.

7. Les membres composant le petit divan se réuniront tous les jours, et s'occuperont sans relâche de tous les objets relatifs à la justice, au bonheur des habitans, et aux intérêts de la république française.

8. Le président aura cent talaris par mois, les autres treize membres quatre-vingt talaris par mois, les secrétaires auront vingt-cinq talaris par mois, l'huissier soixante parahs par jour, le chef des bâtonniers quarante parahs, les autres bâtonniers quinze parahs.

BONAPARTE.



Belbeis, le 13 nivose an 7 (3 janvier 1799).

Au divan du Caire.

J'ai reçu la lettre que vous m'avez écrite, que j'ai lue avec le plaisir que l'on éprouve toujours lorsqu'on pense à des gens que l'on estime et sur l'attachement desquels on compte.

Dans peu de jours je serai au Caire.

Je m'occupe, dans ce moment-ci, à faire faire les opérations nécessaires pour désigner l'endroit par où l'on peut faire passer les eaux pour joindre le Nil et la mer Rouge. Cette communication a existé jadis, car j'en ai trouvé la trace en plusieurs endroits.

J'ai appris que plusieurs pelotons d'Arabes étaient venus commettre des vols autour de la ville. Je désirerais que vous prissiez des informations pour connaître de quelle tribu ils sont; car mon intention est de les punir sévèrement. Il est temps enfin que ces brigands cessent d'inquiéter le pauvre peuple qu'ils rendent bien malheureux.

Croyez, je vous prie, au désir que j'ai de vous faire du bien.

BONAPARTE.



Au Caire, le 18 nivose an 7 (7 janvier 1799).

Au général Marmont.

À mon retour d'une course dans le désert, je reçois vos lettres des 21, 25 et 28 frimaire, et 4 et 6 nivose.

J'approuve les mesures que vous avez prises dans les circonstances essentielles où vous vous êtes trouvé.

Vous sentez bien que le moment d'augmenter la garnison d'Alexandrie n'est pas celui dans lequel vous êtes, d'autant plus que la saison vous débarrassant des Anglais, vous êtes tranquille de ce côté-là.

Que la caravelle parte le plus tôt possible, que le Lodi parte lorsque le citoyen Arnaud sera guéri.

Multipliez vos relations avec Damanhour, où se trouve le quartier-général de la province. Vous recevrez l'ordre de l'état-major, pour que l'adjudant-général Leturcq vous rende compte exactement.

Le citoyen Boldoni part.

J'attends les quatre à cinq cents matelots que vous m'avez annoncés et surtout les Napolitains.

Je donne ordre pour que le village du schérif d'Alexandrie lui soit donné.

Je vous autorise à envoyer un parlementaire aux Anglais: vous leur direz que vous avez appris qu'ils avaient la peste à bord, et que dans ce cas vous leur offrez tous les secours que l'humanité pourrait exiger.

Envoyez un homme extrêmement honnête, qui soit peu parleur et qui ait de bonnes oreilles.

Si Lavalette était à Alexandrie, et que vous eussiez l'idée de l'y envoyer, ce n'est point mon intention; il faut y envoyer un homme qui ait le grade tout au plus de capitaine, qui leur pourra porter les gazettes d'Égypte, et qui tâchera de tirer des gazettes d'Europe, s'ils en ont et s'ils veulent en donner.

Recommandez que l'officier seul monte à bord, de manière qu'à son retour dans la ville il n'y soit pas fait de caquets, et qu'il vous confie seul tout ce qui se sera passé.

Tous les engagemens que vous avez pris avec le divan seront ponctuellement exécutés.

BONAPARTE.



Au Caire, le 22 nivose an 7 (11 janvier 1799).

Au général Murat.

Vous partirez demain, citoyen général, à huit heures du matin. Vous sortirez comme pour aller à Belbeis, dehors de la ville; vous gagnerez le Mokattam; vous vous enfoncerez à deux lieues dans le désert, et vous vous dirigerez en suivant toujours le désert sur le village de Gamasé, province d'Alfiéli, où se trouvent les tribus des Aydé et des Masé, qui ont cent hommes montés sur des chameaux, et qui sont des tribus ennemies.

Le citoyen Venture vous donnera un conducteur qui est un des grands ennemis de ces tribus.

Vous combinerez votre marche de manière à vous reposer pendant la nuit à deux ou trois lieues de ces Arabes, et pouvoir, à la pointe du jour, tomber sur leur camp, prendre tous leurs chameaux, bestiaux, femmes, enfans, vieillards, et la partie de ces Arabes qui sont à pied.

Vous tuerez tous les hommes que vous ne pourrez pas prendre.

Comme le village où ils sont n'est pas éloigné du Nil, vous ferez embarquer sur des djermes, pour nous les envoyer, les femmes, bestiaux, et tous les prisonniers. Vous vous mettrez à la poursuite des fuyards qui nécessairement se porteront du côté de Gendeli et de Toueritz. Vous irez dans l'un et l'autre de ces endroits; de là vous irez jusqu'à la mer Rouge, et vous vous trouverez pour lors à peu près à trois lieues de Suez, au commandant duquel vous écrirez un mot.

Vous mènerez avec vous le chef de brigade Lédé avec quatre-vingts hommes du dix-huitième et du troisième. Vous le chargerez, avec ce détachement, de la garde des prisonniers, du détail de l'embarquement, de la conduite des prisonniers et de tout ce que vous aurez pris.

Indépendamment de quatre jours de vivres que vous avez eu l'ordre d'emporter sur des chameaux, faites-en prendre pour deux jours à la troupe; ce qui vous fera pour six jours.

Dans toute votre marche dans le désert, vous pousserez toujours sur votre droite et votre gauche, à une lieue, un officier et quinze hommes de cavalerie, et vous marcherez sur tous les convois de chameaux que vous rencontrerez dans votre route. Je compte que votre course en produira plusieurs centaines.

BONAPARTE.



Au Caire, le 23 nivose an 7 (12 janvier 1799).

Au général Lanusse.

Je désire, citoyen général, que vous fassiez arrêter le fils d'Abou-Chaïr, et que vous l'envoyiez sous bonne escorte à la citadelle du Caire: c'est un ôtage qu'il est bon d'avoir. Ses biens seront confisqués au profit de la république.

BONAPARTE.



Au Caire, le 25 nivose an 7 (14 janvier 1799).

Au général Caffarelli.

Demain, citoyen général, le général Junot part pour Suez.

Je désire que la position du puits qui se trouve vers la moitié du chemin soit déterminée; que les ingénieurs se munissent de tout ce qui sera nécessaire pour descendre dans ce puits; qu'ils reconnaissent si l'on a creusé jusqu'au roc, et s'il serait possible de creuser davantage; enfin qu'ils mesurent la distance du Caire à Suez.

Après demain d'autres ingénieurs partiront escortés par cinquante hommes, que le général Junot laisse à cet effet. Ils mesureront aussi la distance du Caire à Suez, par la vallée de l'Égarement.

BONAPARTE.



Au Caire, le 25 nivose an 7 (14 janvier 1799).

Au général commandant à Alexandrie.

Je ne conçois pas, citoyen général, comment les consuls étrangers ont pu recevoir une lettre de l'amiral anglais sans que vous en soyez instruit, et je conçois encore moins comment l'ayant reçue, ils l'aient publiée sans votre permission.

Faites-vous rendre compte par les consuls qui leur a remis cette lettre, et faites-leur connaître que si, à l'avenir, ils ne vous remettaient pas toutes cachetées les lettres qu'ils recevraient, vous les feriez fusiller. Si ce cas se représentait, vous m'enverriez la lettre toute cachetée.

Vous ferez mettre le scellé sur tous les effets du nommé Jennovisch, capitaine impérial qui s'est rendu à Alexandrie, et vous me l'enverrez sous bonne escorte au Caire; vous aurez soin de le faire mettre nu, et de prendre tous ses habillemens que vous ferez découdre pour vous assurer qu'il n'y a rien dedans. Vous lui ferez donner d'autres habits.

L'envoi de cet homme à Alexandrie me paraît suspect: du reste, je suis fort aise qu'il y soit, puisqu'il nous donnera des nouvelles du continent; mais qu'il ne parle à personne.

BONAPARTE.



Au Caire, le 26 nivose an 7 (15 janvier 1799).

Au citoyen Poussielgue.

Nous avons le plus grand besoin d'argent. Les fermes doivent six mille talaris; les sagats, mille; les négocians de Damas, sept cents. Voyez de les faire payer dans les vingt-quatre heures.

Vous me ferez demain un rapport sur nos ressources et nos moyens d'avoir de l'argent. Tâchez de nous avoir deux à trois cent mille francs.

Les deux bâtimens de café qui sont arrivés à Suez doivent avoir payé quelques droits; faites-vous-en remettre le montant.

Je vous envoie un ordre pour que les Cophtes versent demain dix mille talaris, après demain dix mille autres; le 1er. pluviose, dix mille; le 3, dix mille autres; le 5, dix mille autres: en tout cinquante mille talaris.

Vous hypothéquerez pour le paiement dudit argent, les blés qui sont dans la Haute-Égypte, et vous leur ferez connaître qu'il est indispensable que cela soit soldé, parce que j'en ai le plus grand besoin.

Vous me ferez demain un rapport sur la quantité d'obligations qu'a en ce moment l'enregistrement, en comptant depuis aujourd'hui, décade par décade.

Enfin, vous me ferez un rapport sur la quantité des villages et terres qui ont été affermés et sur les conditions desdits affermages.

Vous demanderez deux mois d'avance à tous les adjudicataires des différentes fermes.

BONAPARTE.



Au Caire, le 16 nivose an 7 (15 janvier 1798).

Au contre-amiral Ganteaume.

Vous vous rendrez à Suez, citoyen général; vous y passerez une inspection rigoureuse de tous les établissemens de la marine de Suez; vous donnerez les ordres pour que tous les magasins et établissemens soient conformes au projet que j'ai d'organiser et de maintenir à Suez un petit arsenal de construction.

La chaloupe canonnière la Castiglione sera sans doute de retour.

Si les trois autres chaloupes canonnières sont prêtes, bien armées, et dans le cas de remplir une mission dans la mer Rouge, vous partirez avec elles.

Vous vous rendrez à Cosseir, Vous vous emparerez de tous les bâtimens appartenant aux mameloucks, qui sortiront du port.

Vous vous emparerez du fort, et vous le ferez mettre sur-le-champ dans le meilleur état de défense.

Vous tâcherez de correspondre avec le général Desaix. Vous laisserez en croisière, devant le port de Cosseir, une partie de vos chaloupes canonnières.

Vous mènerez avec vous un commissaire de la marine, et un officier intelligent que vous établirez à Cosseir, commissaire et commandant des armes.

Vous ferez tous les réglemens que vous jugerez nécessaires pour l'établissement de la douane, pour la formation des magasins nationaux, la recherche de tout ce qui appartenait aux mameloucks, et pour le commerce.

Vous écrirez à Yamb'o, Gedda et Mokka, pour faire connaître que l'on peut venir, en toute sûreté, commercer dans le port de Suez; que toutes les mesures ont été prises pour l'organisation du port, et pour pouvoir fournir aux bâtimens tous les secours dont ils auront besoin.

Vous embarquerez sur chacune de vos chaloupes canonnières vingt hommes, dont quarante de la légion maltaise, dix canonniers que vous laisserez en garnison à Cosseir, et trente hommes de la trente-deuxième demi-brigade.

Vous ferez embarquer deux pièces de quatre, de campagne, que vous laisserez pour armer le fort de Cosseir, si on n'y en trouve pas.

Du reste, vous combinerez votre marche de manière que, autant que les vents pourront le permettre, vous soyez, de votre personne, de retour au Caire du 15 au 20 pluviose.

Je vous enverrai, par l'officier qui part dans deux jours, des lettres pour Mascate et Djedda, que vous ferez parvenir à leur destination.

Si les quatre armemens n'étaient pas achevés, vous enverriez alors les trois qui seraient prêts, avec les mêmes instructions que je vous donne; mais vous resteriez à Suez, et donneriez le commandement à un capitaine de frégate.

BONAPARTE.



Au Caire, le 26 nivose an 7 (15 janvier 1799).

Bonaparte, général en chef, ordonne:

Tous les adjudicataires des fermes ou douanes de la république paieront, du 1er au 10 pluviose, les mois de pluviose et ventose d'avance.

BONAPARTE.



Au Caire, le 26 nivose an 7 (15 janvier 1799).

Bonaparte, général en chef, ordonne:

Les Cophtes verseront cinquante mille talaris, à titre d'emprunt, savoir: demain, dix mille talaris; après demain, dix mille; le 1er. pluviose, dix mille; le 3 idem, dix mille; le 5 id., dix mille. En tout, cinquante mille talaris.

Il leur sera vendu, pour cette somme, une quantité de blés de la Haute-Égypte.

BONAPARTE.



Au Caire, le 26 nivose an 7 (15 janvier 1799).

Bonaparte, général en chef, ordonne:

Il sera formé un conseil des finances, chez l'administrateur des finances, qui se réunira demain à deux heures après-midi. Il sera composé des citoyens Monge, Caffarelli, Blanc, James, et de l'ordonnateur en chef.

Ce conseil s'occupera: 1°. du système et du tarif des monnaies et des changemens possibles à y faire, les plus avantageux à nos finances; 2°. des opérations que dans la position actuelle de l'Égypte, on pourrait faire pour procurer de l'argent à l'armée et accroître ses ressources; 3°. du plan raisonnable que l'on pourrait adopter pour, sans diminuer les revenus de la république, donner aux soldats de l'armée une récompense qu'ils ont méritée à tant de titres.

BONAPARTE.



Au Caire, le 27 nivose an 7 (16 janvier 1799).

Au général Marmont.

Faites faire, tous les cinq jours, une visite des hôpitaux par un officier supérieur de ronde, qui prendra toutes les précautions nécessaires à cet effet, qui visitera tous les malades, et fera fusiller sur-le-champ dans la cour de l'hôpital les infirmiers ou employés qui auraient refusé de fournir aux malades tous les secours et vivres dont ils ont besoin. Cet officier, en sortant de l'hôpital, sera mis pour quelques jours en réserve dans un endroit particulier.

Vous avez bien fait de faire donner du vinaigre et de l'eau-de-vie à la troupe. Épargnez l'un et l'autre; il y a loin d'ici au mois de juin.

BONAPARTE.



Au Caire, le 29 nivose an 7 (18 janvier 1799).

Au général Verdier.

Je reçois, citoyen général, vos lettres des 24 et 25. J'ai appris avec intérêt l'expédition que vous avez faite contre les Arabes de Derne.

Le scheick du village de Mit-Massaout est extrêmement coupable; vous le menacerez de lui faire donner des coups de bâton, s'il ne vous désigne pas l'endroit où il y aurait d'autres mameloucks et d'autres pièces qu'ils auraient cachées. Vous vous ferez donner tous les renseignemens que vous pourrez sur les bestiaux appartenant aux Arabes de Derne qui pourraient être dans son village: après quoi vous lui ferez couper la tête, et la ferez exposer avec une inscription qui désignera que c'est pour avoir caché des canons.

Vous ferez également couper la tête aux mameloucks, et vous enverrez à Gizeh les trois pièces de canon que vous avez trouvées dans ce village. Faites une proclamation dans la province, pour que tous les villages qui auraient des canons, aient à les envoyer dans le plus court délai.

BONAPARTE.



Au Caire, le 3 pluviose an 7 (22 janvier 1799).

Bonaparte, général en chef, ordonne:

La maison qu'occupe le général Lannes dans l'île de Baouda avec vingt feddams de terre, dix de chaque côté, lui sont donnés en toute propriété.

La maison qu'occupe le général Dommartin et le jardin qui est vis-à-vis, à gauche du nouveau chemin, lui sont donnés en toute propriété.

La maison qu'occupe le général Murat lui est donnée en toute propriété.

L'île de Baouda sera partagée en dix portions: seront exceptées la partie sud, où est le Mekkias, et la partie nord, où il y a une batterie, avec un arrondissement convenable.

L'île vis-à-vis Boulac, où est le lazaret, sera partagée en dix portions.

Le général en chef se réserve le soin de donner ces vingt portions à des officiers de l'armée qui les mériteront.

L'administrateur général des finances fera rédiger, dans la journée de demain, par le bureau d'enregistrement, les actes de propriété de ces différens officiers, et prendra des mesures pour exécuter d'ici au 20 pluviose l'article 2 du présent ordre. Les actes de propriété seront remis chez le payeur.

Le chef de l'état-major général fera connaître aux généraux en chef Dommartin, Lannes et Murat, que ces biens leur sont donnés en gratification extraordinaire pour les services qu'ils ont rendus dans la campagne et pour les dépenses qu'elle leur a occasionnées.

BONAPARTE.



Au Caire, le 6 pluviose an 7 (25 janvier 1799).

À l'iman de Mascate.

Je vous écris cette lettre pour vous faire connaître ce que vous avez déjà appris sans doute, l'arrivée de l'armée française en Égypte.

Comme vous avez été de tout temps notre ami, vous devez être convaincu du désir que j'ai de protéger tous les bâtimens de votre nation, et que vous les engagiez à venir à Suez, où ils trouveront protection pour leur commerce.

Je vous prie aussi de faire parvenir cette lettre à Tipoo-Saïb, par la première occasion qui se trouvera pour les Indes.

BONAPARTE.



Au Caire, le 6 pluviose an 7 (25 janvier 1799).

À Tipoo-Saïb.

Vous avez déjà été instruit de mon arrivée sur les bords de la mer Rouge avec une armée innombrable et invincible, remplie du désir de vous délivrer du joug de fer de l'Angleterre.

Je m'empresse de vous faire connaître le désir que j'ai que vous me donniez, par la voie de Mascate et de Mokka, des nouvelles sur la situation politique dans laquelle vous vous trouvez. Je désirerais même que vous pussiez envoyer à Suez ou au grand Caire quelque homme adroit qui eût votre confiance, avec lequel je pusse conférer.

BONAPARTE.



Au Caire, le 6 pluviose an 7 (25 janvier 1799).

Au sultan de la Mecque.

J'ai reçu la lettre que vous m'avez écrite, et j'en ai compris le contenu. Je vous envoie le règlement que j'ai fait pour la douane de Suez, et mon intention est de le faire exécuter ponctuellement. Je ne doute pas que les négocians de l'Hygiaz ne voient avec gratitude la diminution des droits que j'ai faite pour le plus grand avantage du commerce, et vous pouvez les assurer qu'ils jouiront ici de la plus ample protection.

Toutes les fois que vous aurez besoin de quelque chose en Égypte, vous n'avez qu'à me le faire savoir, et je me ferai un plaisir de vous donner des marques de mon estime.

BONAPARTE.



Au Caire, le 6 pluviose an 7 (25 janvier 1799).

Au général Berthier.

Vous partirez, citoyen général, le 10 pluviose, pour vous rendre à Alexandrie: vous vous y embarquerez sur la frégate la Courageuse: vous aurez avec vous deux bâtimens du convoi, bons voiliers, que j'ai fait arranger à cet effet.

Dès l'instant que vous aurez rencontré quelque bâtiment qui vous aura donné des nouvelles, vous m'en expédierez un sur Damiette, le lac Bourlos ou même sur Alexandrie, si les vents l'y portaient. Vous m'expédierez l'autre dès l'instant que vous aurez appris d'autres nouvelles, ce que je désirerais être avant que vous ne touchassiez aucune terre d'Europe.

Le plus sûr paraît être que vous vous dirigiez sur les côtes d'Italie du côté du golfe de Tarente, du port de Crotone, et, si le temps le permet, de remonter le golfe Adriatique jusqu'à Ancône. Soit que vous touchiez à Corfou ou à Malte, ou dans un point quelconque, ne manquez pas de m'envoyer toutes les nouvelles que vous pourriez avoir, en m'expédiant des bâtimens, auxquels vous donnerez l'instruction spéciale de se diriger sur Damiette.